
Rencontre avec Emmanuelle Duez, Fondatrice The Boson Project
12 novembre 2020 / France
Pouvez-vous vous présenter en quelques phrases ? Votre carrière, votre job, vos hobbies et passions.
Je suis une entrepreneuse dans l’âme.
Après des études plutôt plurielles (en passant du droit privé, à Sciences po, puis de l’ESSEC à une dernière année à la Bocconi), j’ai fondé The Boson Project.
The Boson Project, c’est une société de conseil par laquelle nous créons avec mon équipe les conditions permettant l’expression pleine et entière de l’excellence humaine individuelle et collective au sein des organisations, qu’elles soient entreprises privées ou organismes publiques. Mais The Boson Project c’est surtout bien plus qu’un cabinet classique, c’est un projet prolifique qui abrite en son sein plusieurs initiatives :
- À la Croisée des Mondes, une épopée civilo-militaire à destination des dirigeants et commandants pour les faire prendre de la hauteur sur la notion de leadership et leurs responsabilités en tant que décideurs,
- Tchatche, un spectacle citoyen de joutes oratoires complètement déjanté pour démocratiser la complexité de grands sujets de société,
- Belleville by Boson, une agora citoyenne, un espace hors du temps à Paris que nous louons aux entreprises pour s’extraire de leur quotidien et penser autrement et dans lequel nous organisons des événements ouverts au grand public,
- The Boson Space, un savoir-faire que nous développons depuis maintenant 4 ans pour que les projets immobiliers et spatiaux soient mis au service des enjeux humains d’aujourd’hui et de demain.
À côté de ça, j’ai embarqué sur un projet d’edutech, Bugali, qui développe une expérience de lecture augmentée pour les tout petits, pour réinventer l’apprentissage des enfants en bas âge en ayant recours à de la tech non invasive.
Je mets toujours l’impact au cœur de mon aventure entrepreneuriale, c’est-à-dire que je mets l’entrepreneuriat au service de mes convictions et pas l’inverse. Pour moi, l’entrepreneuriat n’est pas une fin en soi, c’est juste un moyen de passer à l’échelle mon engagement.
Mes passions ? Mes filles, le cirque (rires) et mon équipe… qui sont aussi mes amis.
Emmanuelle Duez, Fondatrice The Boson Project“Je mets toujours l’impact au coeur de mon aventure entrepreneuriale, c’est-à-dire que je mets l’entrepreneuriat au service de mes convictions et pas l’inverse. “
Pourquoi avoir créé The Boson Project ? Quelle en est la mission ?
J’ai créé The Boson Project il y a près de 10 ans maintenant. Et ce pour plusieurs raisons.
La première c’est que je trouvais en tant que juriste absurde qu’une entreprise, personne morale, puisse détruire à ce point des personnes physiques. Je l’ai vécu dans ma chair en grandissant et en regardant les gens autour de moi. Il fallait pouvoir créer des dynamiques organisationnelles et managériales plus vertueuses, qui prennent davantage soin des gens tout en révélant le meilleur d’eux-mêmes.
La deuxième, c’est qu’après une formation sciences po, et après un passage en cabinet ministériel, je crois moins en la puissance publique et en l’État seuls pour avoir de l’impact aujourd’hui, qu’à l’effet systémique d’entreprises qui s’engagent.
C’est pourquoi nous nous attelons à accompagner la transformation des organisations et les dirigeants pour qu’ils prennent leurs responsabilités dans un monde en pleine mutation. Et concrètement ça veut dire :
- Être beau dedans pour que ça se voit dehors : avoir des entreprises parfaitement alignées et droites dans leurs bottes,
- Faire en sorte qu’à partir de cette intégrité interne et de l’excellence humaine naisse un engagement sociétal de l’entreprise,
- Relier les dirigeants les uns avec les autres pour créer de nouvelles dynamiques et passer à l’échelle.
Sur votre profil LinkedIn, vous vous définissez comme “fondamentalement militante”. Pour quelles causes militez-vous?
Je suis fondamentalement militante. Mon combat historique, qui a commencé avec la création de WomenUp en 2011, c’est le féminisme. Un féminisme ouvert et inclusif, avec un regard stratégique posé sur le sujet hommes/femmes pour que les mots soient suivis d’effets et portés par les nouvelles générations aux sensibilités accrues.
J’en viens à mon deuxième engagement de cœur : la jeunesse. Puisque je pense que c’est un moteur qui draine une transformation culturelle totale de la société et de nos entreprises. Comme disait Georges Bernanos, « C’est la fièvre de la jeunesse qui maintient le reste du monde à la température normale. Quand la jeunesse se refroidit, le reste du monde claque des dents. » 10 ans après WomenUp, je pose sur eux un regard bienveillant, un regard humble surtout. Car les défis que cette génération va devoir relever vont être immense et ils n’ont pourtant rien demandé. Je combats en brèche l’histoire des luttes intergénérationnelles, mais néanmoins je pense que c’est hypocrite et coupable de la part des anciennes générations de stigmatiser une jeunesse qui va devoir s’attaquer à des enjeux inédits et inouïs dans l’histoire de l’humanité.
Dans vos discours, vous faites souvent référence au leadership militaire. Pourquoi est-ce que l’Armée est une source d’inspiration dans votre réflexion sur l’entreprise? Que vous a-t-elle appris?
J’ai intégré la réserve citoyenne il y a 5 ans maintenant. Je suis capitaine dans la Marine nationale et une de mes missions consiste à créer des ponts entre les mondes civil et militaire. Et là où ça porte tout son sens, c’est que chez les Bosons nous prônons un idéal de subsidiarité en termes de transformation interne, c’est à dire la responsabilité et le pouvoir portés au niveau le plus approprié. Or nous avons beaucoup à apprendre d’organisations comme la Marine nationale qui fonctionne sur ce principe avec des éléments très forts comme « la fonction primant sur le grade » ou « la délégation de commandement » qui sont des éléments dont on s’avère être complètement incapable de mettre en place dans le monde de l’entreprise.
Et puis on n’arrêtait pas de bassiner aux dirigeants que le modèle organisationnelle des startups, c’était l’entreprise de demain. Et en fait ça avait du mal à parler aux entreprises traditionnelles parce qu’elles n’avaient pas du tout été bâties sur ces codes. Alors que la Marine nationale, finalement, est très proche de grandes entreprises centenaires et industrielles de plusieurs milliers de salariés.
C’est pourquoi les exemples militaires sont extrêmement importants pour nous.

Pensez-vous que dans le monde actuel, les managers sont à la hauteur des attentes de leurs équipes? Pensez-vous que suite à la crise du Covid-19, les managers ont pris conscience de l’importance du bien-être de leurs collaborateurs?
Les managers ont de tout temps été un levier majeur de transformation des organisations.
Depuis un moment déjà les collaborateurs aspirent à ce qu’on prenne soin d’eux, à ce qu’on cultive leur engagement, qu’on leur donne du sens, qu’on crée les conditions leur permettant l’épanouissement de leur potentiel individuel et collectif.
Et les managers sont la pierre angulaire de cette performance par le care.
Aujourd’hui la pandémie montre à quel point ceux qui sont au front dans les entreprises et qui sont les liens invisibles d’un corps social qui se fracture, ce sont les managers de proximité.
Dans le monde d’avant on était beaucoup dans l’incantation, l’intention et la communication sans concrétisation des faits. Aujourd’hui, le contexte dans lequel nous sommes de massification du travail à distance, d’archipellisation des lieux de travail, de fracturation du corps social et d’angoisse des collaborateurs rappelle le manager à leurs premières responsabilités: prendre soin de leurs équipes. Et en cela les entreprises se rappellent qu’ils sont des maillons absolument indispensables de la chaîne de performance d’une organisation. Donc même s’ils n’ont pas systématiquement été au rendez-vous, ils réalisent aujourd’hui le caractère essentiel de leur rôle et la transformation profonde et accélérée de leur métier. Alors que la pandémie secoue nos modes de travail, nous réalisons qu’un mauvais manager en puissance est d’autant plus un mauvais manager à distance. Et ils ont donc plus besoin que jamais d’être outillés pour accompagner les équipes dans cette période tumultueuse, et c’est pour ça que c’est un sujet qu’on creuse en profondeur en ce moment chez les Bosons.
En tout cas, on observe une revalorisation de la mission managériale avec une réelle prise de conscience de leur potentiel sur la dynamique humaine et de leurs responsabilités.
Emmanuelle Duez, Fondatrice The Boson Project“Aujourd’hui, le contexte dans lequel nous sommes de massification du travail à distance, d’archipellisation des lieux de travail, de fracturation du corps social et d’angoisse des collaborateurs rappelle le manager à leurs premières responsabilités : prendre soin de leurs équipes.”
Décrivez-nous une journée type dans la semaine d’Emmanuelle.
Je me lève euh… tôt (rires).
Aujourd’hui je me suis levée à 5h du matin chez moi en Bretagne, j’ai pris le train pour Paris, j’en ai profité pour répondre à cette interview, écrire des articles et répondre à mes équipes (avec plein de smileys). Je fais 7 à 8 rendez-vous par jour et le soir j’enchaîne avec des « faux » rendez-vous de boulot : des clients qui sont devenus des amis, avec qui je partage des Spritz Saint Germain et avec qui je réfléchis à comment changer le monde plus vite et plus fort.
Le vendredi, je ne travaille pas, je suis avec mes deux filles et personne n’a le droit de me déranger pendant cette journée sacrée. C ’est aussi pour ça que c’est aussi speed et dense le reste de la semaine, c’est pour avoir un peu de temps à consacrer à mes deux merveilles.
Si vous n’aviez pas exercé votre métier actuel, quel autre métier auriez-vous rêvé de pratiquer?
Je pense que j’aurais été militaire. D’ailleurs j’y avais réfléchi très sérieusement quand j’étais à l’ESSEC, j’aurais rêvé être commandant de navire.

Vous souhaitez en savoir plus?
Emmanuelle Duez est intervenue dans notre webinar Retour ver le futur: à l’heure du retour au bureau, comment préparer de l’entreprise de demain?.
Pour voir le replay, inscrivez-vous.
Publié par Setareh Olgiati
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